Fasciolose
Les fascioloses (distomatoses) sont des anthropozoonoses
dues au développement accidentel chez
l’homme de parasites trématodes.
La distomatose hépatique
à Fasciola hepatica est la fasciolose la plus souvent
observée en France.
D’autres distomatoses
d’expression intestinale (Fasciolopsis buski), pulmonaire
(Paragonimus westermani, Paragonimus mexicanus,
Paragonimus uterobilateralis, Paragonimus
africanus) ou hépatobiliaire (Fasciola gigantica, Dicrocoelium
dendriticum, Clonorchis sinensis, Opisthorchis
viverrini et Opisthorchis felineus) peuvent être rencontrées
dans différentes régions du monde.
Agent causal :
Fasciola hepatica ou « grande douve » est un trématode.
Ce sont des vers plats non segmentés, foliacés, qui
mesurent 20 à 30 mm de long sur 8 à 13 mm de large.
Outre leurs deux ventouses, ils sont munis sur la cuticule
externe d’épines cytoplasmiques qui facilitent leurs
déplacements tissulaires. L’appareil génital est hermaphrodite.
Les douves adultes ont une longévité de 10 à
12 ans dans les canaux biliaires de leurs hôtes.
Cycle évolutif :
Le cycle naturel de Fasciola hepatica fait intervenir différents
hôtes vertébrés et invertébrés. La douve adulte
vit dans les canaux biliaires des bovins et des ovins. Elle
pond des œufs non embryonnés qui sont éliminés avec
les matières fécales. Ces œufs évoluent jusqu’à la formation
d’un embryon cilié ou miracidium en présence
d’eau douce et à une température de plus de 10 °C.
Après éclosion, le miracidium pénètre dans un mollusque
: la limnée. Chez cet hôte intermédiaire, le cycle
se poursuit pour aboutir à la formation de cercaire.
Celle-ci sort activement de la limnée et se fixe sur une
plante immergée, prenant le nom de métacercaire. Les
herbivores se contaminent en consommant ces végé-
taux. Les métacercaires éclosent dans l’estomac ou le
duodénum et les douvules perforent la paroi digestive,
le foie, avant d’atteindre les canalicules biliaires où les
douves matures s’installent. Trois mois après l’ingestion
de la métacercaire, l’adulte pond ses œufs qui gagnent
l’intestin par voie biliaire. La contamination humaine
se fait par consommation de cresson sauvage, mâche,
pissenlit, salade, menthe sauvage cueillie en zone d’élevage.
L’homme est hôte accidentel et ne joue qu’un rôle
accessoire, sinon nul, dans le cycle évolutif du parasite.
Épidémiologie:
La fasciolose à Fasciola hepatica est répandue dans les
pays d’élevage d’ovins et de bovins à condition que le
climat soit suffisamment chaud et humide : Europe,
Amérique latine, Afrique du Nord, Asie. En France, peu
de régions sont épargnées et les principaux foyers se
situent en Normandie, Sud-Ouest, Centre, Vendée,
Bourgogne, Lorraine et Ardennes.
Clinique:
La maladie humaine évolue en deux phases :
• la phase d’invasion:
survient après une latence de 1 à
3 semaines et associe les symptômes suivants : fièvre
irrégulière avec pics atteignant 39 °C, douleurs de
l’hypochondre droit ou de l’épigastre, malaise, asthé-
nie, toux, éruption, urticaire. La perception d’une
hépatomégalie est fréquente ; il existe parfois une
splénomégalie. Les formes aiguës atypiques sont fré-
quentes. Il peut s’agir de manifestations bronchopulmonaires,
de manifestations cardiovasculaires ou
de manifestations neuroencéphaliques ;
• la période d’état:
survient 3à6mois après la contamination.
Un tableau de cholécystite ou d’angiocholite
avec vomissements, un subictère et une hépatomégalie
sont observés. Des scléroses des voies biliaires
et des cirrhoses ont été décrites chez des patients porteurs
chroniques de douves.
Il n’y a pas de description de distomatose transmise au
nouveau-né.
Diagnostic biologique :
Le diagnostic biologique de la fasciolose à Fasciola
hepatica associe des examens non spécifiques, des données
parasitologiques et des tests sérologiques.
— Signes non spécifiques
L’hémogramme montre une hyperleucocytose avec une
hyperéosinophilie (1 000/μlà5 000/μl). Elle apparaît
vers le 15e
jour, est maximale au 2
e
, 3e mois puis évolue
selon la courbe de Lavier, diminuant progressivement
pour se normaliser ou atteindre un plateau après
quelques mois. Cette hyperéosinophilie est un élément
important du diagnostic à la phase d’invasion ; elle est
inconstante à la phase chronique.
Le bilan hépatique est inconstamment perturbé. Les IgE
totales et spécifiques sont élevées.
— Examen parasitologique
La recherche des œufs dans les selles est toujours négative
pendant la phase d’invasion. Pendant la phase
d’état, la faible fécondité des douves chez l’homme rend
leur mise en évidence difficile et nécessite la mise en
œuvre de techniques de concentration. Au total, 35 à
40 % des fascioloses sont diagnostiquées par la découverte
des œufs.
— Diagnostic sérologique
C’est sur les résultats des tests sérologiques que repose
le plus souvent le diagnostic. Il convient d’associer une
technique de précipitation (électrosynérèse) à une
méthode quantitative (hémagglutination, immunofluorescence
ou ELISA).
L’électrosynérèse est réalisée avec un extrait antigénique
délipidé. Les précipitines apparaissent dès la
2
e
semaine après l’infestation et disparaissent progressivement
en plusieurs mois. Les résultats sont positifs
dans plus de 80 % des cas.
L’immunofluorescence indirecte est réalisée sur des
coupes à la congélation de Fasciola hepatica adulte,
incluse dans du muscle strié. Elle est significative pour
un taux supérieur ou égal à 40. La réaction est positive
dans 95 % des cas en phase d’invasion. Elle se positive
à partir de la 3
e
semaine après l’infestation et le reste
en général assez longtemps.
L’hémagglutination est effectuée avec des globules
rouges formolés et traités par la glutaraldéhyde pour
fixer des extraits antigéniques délipidés. Un titre supé-
rieur au 1/320 est nécessaire pour affirmer le diagnostic.
Cette technique est précoce, car elle détecte les IgM
et les IgG. Mais elle se négative plus rapidement que les
précédentes. Elle détecte environ 90 % des fascioloses
en période d’invasion.
Des résultats positifs ou discordants au dépistage
doivent être confirmés par immunoélectrophorèse. La
mise en évidence de plusieurs arcs de précipitation ou
mieux la présence de l’arc 2 spécifique pose le diagnostic
de la fasciolose. Cette technique, très spécifique mais
peu sensible, est positive dans 96 % des fascioloses, dès
la 3
e
semaine après l’infestation.
La confirmation peut être réalisée de manière plus sensible
par la technique de l’immunoempreinte. La pré-
sence de l’une des bandes spécifiques P8-9, P27-28 ou
P60 est en faveur d’une distomatose.
Ces différentes techniques sérologiques détectent les
anticorps tant en période d’invasion qu’à la période
d’état et permettent le diagnostic dans 95 % des cas.
Elles se négativent entre 8 et 12 mois après traitement.
Sous traitement, les titres initiaux des anticorps peuvent
s’élever de manière importante et transitoire en raison
de la libération des antigènes distomiens.
La positivité d’une sérologie doit obligatoirement
entraîner la recherche d’une contamination éventuelle
de l’entourage.
Traitement :
Le traitement a longtemps été le dichlorhydrate de
déhydroémétine (Déhydro-émétine®). Mais sa toxicité
fait qu’il est abandonné au profit de deux autres produits
: le praziquantel (Biltricide®) et le bithionol
(Bitin®).
Actuellement, le triclabendazole (Egaten®) semble efficace
sur les larves et les formes adultes. L’éradication
parasitaire est obtenue dans 80 % des cas après une
prise orale unique de 10 mg/kg, atteignant 94 % en
double dose sur 2 jours.
La prophylaxie
est individuelle et consiste à éviter la
consommation de crudités sauvages.
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